Alice de Maximy, fondatrice de Femmes de Santé
Alice de Maximy, fondatrice de Femmes de Santé
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Atypique et farfelue, c'est ainsi que se décrit Alice de Maximy. Elle est aussi intelligente, engagée et déterminée. C'est d'ailleurs ce qui l'a conduit à créer sa startup et à lancer l'initiative Femmes de Santé. Sa volonté : permettre aux femmes de prendre leur place et réduite les inégalités de genre. Vaste défi auquel elle s'attelle avec acharnement et enthousiasme !
Après un parcours de consultante dans les biotechnologies, vous avez rejoint l’INPES, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé. Quels souvenirs en gardez-vous ?
J’ai en effet travaillé pour Alcimed avant de rejoindre l’INPES pour coordonner la mise en œuvre et la communication de programmes nationaux de prévention-santé. J’ai une réelle fibre « intérêt général », et j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler pendant sept ans sur des sujets aussi variés que le « bien vieillir », la santé environnementale (pollution de l’air intérieur, radon), ou encore la canicule qui a fait plus de 15 000 morts et la pandémie grippale. La communication de crise, c’est un réel métier. C’est pourquoi j’ai installé au sein de cet intistitut l’activité « urgences & menaces sanitaires majeures ».
Vous avez ensuite rejoint l’ARS, où pendant trois ans, vous avez monté et piloté le département communication interne et externe…
J’ai immensément aimé travailler avec Claude Evin qui prenait la tête de l’ARS au moment de sa construction. Il est à l’origine de la loi pour interdire aux gens de fumer dans les lieux publics, et a aussi légiféré sur le sujet de l’alcool. C’est un homme très courageux, droit dans ses bottes, qui a su ne pas céder aux lobbys. Il connaît ses dossiers et n’a pas peur de prendre des coups. Je suis ensuite partie avec mon mari et mes enfants aux Émirats pendant deux ans, puis au Luxembourg. Là-bas, je suis devenue professeure de sciences intégrées et de mathématiques au Lycée français international. J’étais aussi officier en charge de la communication des résultats pour le compte de la Commission européenne.
Comment parvenez-vous à concilier vie pro et perso ?
À un moment de ma vie, j’ai fait le choix de stopper ma carrière pour voir davantage mes enfants. Je suis une maman poule. En revanche, sachant que je suis nulle en cuisine, je ne leur prépare pas de bons petits plats. Ils en ont fait le deuil. Le soir, je tente de ne pas finir après 19h car je ne veux pas louper le début de soirée avec eux. Le week-end, en revanche, j’ai du mal à ne pas être obligée de travailler. Je suis rentrée en France car ma fille aînée est très brillante et elle avait été prise dans un grand lycée parisien. J’essaie d’être très présente pour eux !
Ce qui frappe beaucoup dans votre parcours c’est l’engagement. Que signifie ce mot pour vous ?
C’est le fait d’être aligné avec ses valeurs et de pas aller contre. Je suis très attachée à ce qui me semble juste. Je me suis impliquée par le passé dans Techfugees, puis en tant que professeur bénévole aux côtés d’une réfugiée érythréenne. Se sentir utile pour quelqu’un, ça fait du bien. Puis, si je me suis lancée dans mon projet, c’est parce que les femmes n’étaient pas assez visibles à des postes d’expertes. Elles ont tendance à ne pas se mettre en avant, à ne pas oser. Dans un colloque, les premiers à prendre la parole sont souvent les hommes.
Est-ce que vous vous décrivez comme « féministe » ?
Si être féministe, c’est rétablir une inégalité existante et vérifiée, alors oui. Mais je refuse l’opposition des genres. Il y a des hommes dans notre collectif, et je m’en réjouis. Pour rétablir une égalité de genre, il faut passer par l’équité dans tous les domaines. Pas seulement dans l’univers professionnel, mais aussi dans le quotidien d’un couple. On voit bien que souvent, après un divorce, les femmes repartent sans rien car elles ont payé les courses, et les hommes les grosses dépenses.
“ Les femmes ne sont pas assez visibles à des postes d'expertes ”
Votre structure est ensuite montée en puissance…
Notre objectif est de co-construire un système de santé plus juste, plus équitable et plus égalitaire par le biais de l’intelligence collective et pluridisciplinaire, grâce à la sororité. Notre réseau est pluriprofessionnel et nous avons explosé les cloisons qui sclérosent l’ensemble du système, que ce soit entre le public et le privé, entre l’administration et les soignants, entre les niveaux hiérarchiques… Ce qui réunit les membres du collectif, ce sont les valeurs d’entraide et la volonté de faire avancer les choses de manière positive.
Quels sont vos projets ?
En 2022, nous avons proposé des solutions pour améliorer la santé de la femme sur la base d’une synthèse bibliographique et d’atelier. Nous avons pointé du doigt la charge mentale qui représente un frein aux soins, il faut donc à tout prix que l’allègement de la charge mentale soit un indicateur dans les campagnes de prévention… Le 8 décembre 2023, le docteur Catherine Azoulay a présenté une nouvelle revue de la littérature sur la santé environnementale, et nos travaux sur le sujet ont été présentés à l’occasion de nos États généraux. Nous proposons aussi des solutions pour améliorer la santé environnementale. Le 8 mars prochain, à l’occasion de la Journée internationale du droit des femmes, nous offrons la possibilité aux femmes de santé de pitcher un sujet innovant sur le thème « sport et santé » en hommage aux Jeux olympiques.
Vous-même, vous semblez très alignée. Comment décririez-vous votre personnalité ?
Je suis farfelue parce que je suis capable d’aller faire « la poule » pour aller dire au revoir à mes enfants ou mettre un pull violet à poils longs pour aller bosser. Je veux un environnement où je puisse être moi-même. Où je puisse aller courir à l’heure du déjeuner et aller me doucher au bureau. Où je puisse mettre des baskets roses si ça me chante et gérer une urgence personnelle sur des horaires de bureau. J’ai besoin de liberté professionnelle, et de ne pas avoir de contraintes. Dans ma boîte, on a le droit d’être humain, faillible, bref soi-même. Tout en respectant les autres bien sûr ! Je déteste rentrer dans un moule, et ne souhaite pas l’imposer aux autres. Mon talon d’Achille, c’est que je continue à vouloir trop aider les gens. Or je n’en ai pas le temps. Désormais, je me pose 5 questions avant d’aider quelqu’un et si une de mes réponses est négative, j’y renonce.
C’était quoi votre rêve de petite fille ?
Je voulais travailler dans la petite enfance. J’ai besoin de choses positives, et je dois avouer que le monde de la santé est un environnement très dur, car on parle beaucoup de maladies et j’ai tendance à ne pas me protéger assez. Quand j’ai travaillé sur les accidents domestiques des enfants, j’étais une jeune mère et le fait d’entendre parler de défenestrations, de bébés noyés… cela m’atteignait beaucoup. J’ai du mal à composer avec le sentiment d’impuissance face à la détresse humaine.
C’est quoi pour vous une journée idéale ?
Une journée où je ne fais rien, et où je ne culpabilise pas de ne rien faire. Il faut que je m’affranchisse de ce sentiment de culpabilité. Je suis la caricature des femmes que nous accompagnons, et ce n’est d’ailleurs pas un hasard si nous les aidons.