Changer le monde

Edito INSPIR' 73 | Charles Znaty

Les trois quarts des Français ont une bonne image de l’entreprise. Une proportion à faire pâlir d’envie les responsables politiques, souvent déconsidérés dans notre pays. Il aura fallu beaucoup de temps et bien des efforts pour que les entrepreneurs soient enfin pris pour ce qu’ils sont : des créateurs de richesses pour tous et des usines à solutions. Longtemps, par un effet de persistance rétinienne, l’image héritée d’il y a deux siècles d’une élite usant de ses privilèges leur a collée à la peau, caricature indigne que certains continuent de propager. Ont-ils remarqué que les entrepreneurs sont assez rarement coiffés de haut-de- forme, qu’ils fument moins le cigare que les rappeurs et qu’ils ne posent moins souvent leurs pieds sur leur bureau que les jeunes ingénieurs des start-up ? Ont-ils noté qu’ils prennent tous les risques, dans un monde plus dur que jamais pour les affaires, soumis à l’épreuve intransigeante et parfois inéquitable de la concurrence internationale ? Qu’ils s’inscrivent dans un nouveau rapport de force, inédit et complexe, et doivent composer avec tous les pouvoirs, locaux, nationaux, géopolitiques, scientifiques, technologiques, créatifs, culturels, associatifs et citoyens ? Ont-ils seulement pris la mesure des transformations que les entreprises ont dû accomplir à la vitesse de la lumière ? En quelques années seulement, elles ont dû conduire leur révolution digitale, enclencher leur transi- tion environnementale, gérer le big bang de l’intelligence artificielle et, surtout, placer leur responsabilité sociale au cœur de leur modèle économique. En d’autres termes, tout en répondant aux demandes de leurs actionnaires, aux contraintes réglementaires et aux aspirations de leurs salariés, en particulier des nouvelles générations, elles ont décidé d’aligner, autant qu’il est possible, leurs intérêts sur ceux des citoyens. Quand les affaires prospèrent, les finances publiques se redressent, la pauvreté recule, la santé des humains et leur moral s’améliorent, celle de la planète aussi. À l’heure où la France traverse un moment politique pour le moins délicat, et où le monde, qu’on espérait tendu vers la concorde, voit les tensions se multiplier, au Moyen- Orient, en Asie et même aux portes de l’Union, qui mieux que les entreprises incarnent la stabilité ? Quand la mer est forte, l’entrepreneur tient la barre. « Le pessimiste se plaint du vent, l’optimiste espère qu’il va changer, le réaliste ajuste ses voiles », écrivait l’historien britannique Thomas Fuller il y a quatre siècles. Nous dirigeants faisons délibérément partie des réalistes.